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Benjamin Péret dans CQFD (n°149, décembre 2016)


[Article de CQFD mis en ligne sur leur site le 14 juillet 2019]

Biographie de Benjamin Péret

« Vive la France et les pommes de terre frites ! »

Poète surréaliste invectivant bourgeois, militaires et prêtres, militant engagé avec les anarchistes pendant la guerre d’Espagne, Benjamin Péret a fait l’objet d’une biographie parue chez Libertalia.

Décédé le 18 juillet 1959 à Paris à l’âge de 60 ans, le poète surréaliste Benjamin Péret est enterré quelques jours plus tard au cimetière des Batignolles. Sur sa tombe, une plaque proclame : « Je ne mange pas de ce pain-là » – titre de l’un de ses recueils de poèmes paru en 1936, invectivant bourgeois, militaires et prêtres, et maxime résumant le mieux la vie de ce révolté permanent.

Né à Rezé (Loire-Atlantique) dans une famille modeste, dadaïste criant « Vive la France et les pommes de terre frites ! » pour fustiger le chauvinisme à l’issue de la grande boucherie de 1914-1918, poète surréaliste adepte des « sommeils » et de l’écriture automatique, combattant avec les anarchistes en Espagne et exilé au Mexique de 1942 à 1948, Benjamin Péret (1899-1959) est le seul que Breton n’a jamais osé critiquer. Il est aussi le premier à adhérer au Parti communiste, le premier aussi à en sortir pour rejoindre l’Opposition trotskiste avant d’évoluer vers l’ultragauche qui refusait, comme Natalia Sedova, la veuve de Trotski, de voir dans l’URSS un socialisme trahi, mais avec plus de clairvoyance, un capitalisme d’État stalinien.

Grâce à une large documentation et à une utilisation judicieuse des écrits de Péret lui-même – dont un florilège est reproduit en annexe –, cette biographie intellectuelle et poétique de l’auteur du Passager du transatlantique et du Déshonneur des poètes lui rend sa place, de premier plan, dans l’histoire des avant-gardes littéraires et politiques du XXe siècle. Cela compensera un peu l’oubli où l’ont tenu la plupart des historiens du surréalisme alors même que Breton lui-même définissait celui-ci comme « la beauté de Benjamin Péret écoutant prononcer les mots de famille, de religion et de patrie ».

Si Péret, malgré sa fibre libertaire, ne rompit pas avec le léninisme, la raison s’en trouve sans doute dans le distinguo qu’il établit entre ses activités poétiques et politiques. Il appartiendra aux situationnistes de dépasser ce clivage dans une démarche unitaire tout en rendant hommage à celui qui avait été, parmi les surréalistes, « le seul à s’engager dans la révolution espagnole, le seul à être resté un anticlérical farouche » (R. Vaneigem).

Henri Blanc

Un « ami » de Benjamin Péret


Monsieur Duwa n’a pas apprécié mon essai « Benjamin Péret, l’astre noir du surréalisme » que j’ai publié aux éditions Libertalia en 2016. Il a écrit quelques lignes contre ce livre dans la revue Cahier critique de poésie de Marseille pour le dire :

Extrait 1 :
« L’ambition de cet essai ne se résume pas à reprendre l’intrigue surréaliste depuis ses origines dadaïstes en examinant la spécificité réelle des positions défendues par Péret au sujet des religions, de l’automatisme ou de la lutte révolutionnaire. L’essayiste entend aussi distinguer Péret du reste du groupe surréaliste, voire l’opposer à Breton au plan politique.

Monsieur Duwa est le Monsieur Jourdain du surréalisme. Comme le mot d’ordre du surréalisme était « Transformer le monde, a dit Marx. Changer la vie, a dit Rimbaud. Ces deux mots d’ordre pour nous n’en font qu’un », il suppose que tous les membres du groupe surréaliste mettaient cela en pratique dans leur vie quotidienne de la même manière, et que privilégier l’itinéraire de Péret, c’est forcément opposer Péret au « reste du groupe », voire l’opposer à Breton…

Mais peut-être que Monsieur Duwa préférerait qu’on ne distingue pas trop Péret du reste du groupe justement… Pourquoi ? ça pose problème ?

Extrait 2 :
L’activité militante de Péret depuis son premier séjour au Brésil, durant la guerre d’Espagne ou après son exil au Mexique manifesterait la permanence d’un projet de transformation du monde par ailleurs délaissé par le groupe surréaliste. Mais si ce dernier avait vraiment démérité, Péret l’aurait abandonné sans regret. »

Apparemment, Monsieur Duwa n’est pas sûr que l’activité militante de Péret s’inscrivait dans un « projet permanent de transformation du monde » (il l’écrit au conditionnel). Au passage, cette activité révolutionnaire a été chez Péret continue, débutant avant le premier séjour au Brésil et ne cessant qu’à sa disparition (précisons que Péret n’a pas participé à la « guerre d’Espagne » mais à la révolution espagnole. Si Monsieur Duwa ne voit pas quelle est la différence, rappelons ici ce qu’écrivait en 1937 la surréaliste Mary Low qui était, avec son compagnon Juan Bréa, en Espagne  en même temps que Péret : « Il n’y avait plus grand-chose qui nous retenait à Barcelone. Les milices avaient été dissoutes après les débuts de la militarisation. La Généralité était perdue, du moins en ce qui nous concernait. Il restait la guerre à gagner sans doute, mais c’était la révolution qui nous intéressait. » (Red Spanish Notebook, 1937)

« Si le groupe surréaliste avait vraiment démérité, Péret l’aurait abandonné sans regret », écrit Monsieur Duwa. C’est possible, cela ne s’est pas produit. Mais l’affirmer comme un contre-exemple comme Monsieur Duwa le fait ici sans précaution et brutalement, c’est totalement méconnaître ce qui rapprochait Péret et Breton.

* * *

Sur la quarantaine d’articles et notes de lecture publiés sur Benjamin Péret l’astre noir du surréalisme, la note de lecture de Monsieur Duwa est la seule à être négative. C’est son droit. Il est vrai aussi que je consacre l’essentiel du livre à situer l’itinéraire poétique et politique de Péret dans les enjeux utopiques du surréalisme. Utopie, politique, révolution, critique sociale, ce n’est peut-être pas la tasse de thé de Monsieur Duwa.

Pourquoi je m’étend ici sur cette note de lecture et sur Monsieur Duwa en particulier ?

Ce n’est pas parce que Monsieur Duwa n’apporte aucun argument justifiant ses critiques (il faut le croire visiblement sur parole), mais parce qu’il trompe ses lecteurs en omettant de préciser qu’il est partie prenante du sujet et que sa critique est partisane : Monsieur Duwa est en effet un des animateurs de l’Association des Amis de Benjamin Péret et un des animateurs des Cahiers Benjamin Péret publié par cette association… Une information qu’il s’est bien gardé de communiquer aux lecteurs.

Barthélémy Schwartz,
7 décembre 2017

 

Débat : Benjamin Péret, l’astre noir du surréalisme – Festival de la CNT à la Parole errante (Montreuil)(24 juin 2017)


http://www.cnt-f.org/festival-cnt/event/benjamin-peret-lastre-noir-du-surrealisme/

 

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