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Dorénavant – Andrew White / Comics Workbook Magazine


Andrew White anime Comics Workbook Magazine aux États-Unis, qu’il co-édite avec Zach Mason. Il s’agit du pendant imprimé du site Comics Workbook que tient le dessinateur Frank Santoro. Il a accepté de parler de Dorénavant et des « 73 notes sur la bande dessinée » qu’il a traduite en anglais.

http://www.du9.org/dossier/dorenavant-andrew-white/

Du9 : Dorénavant a 30 ans


Capture d’écran 2016-01-19 à 12.45.07Après l’Éprouvette (l’Association) en 2006, le site Du9 consacre un copieux dossier à Dorénavant, une revue avant-gardiste en bande dessinée qui n’a pas fini de faire parler d’elle !

 

Dorénavant / dorénaprès


Entretien de Jean-Christophe Menu et Barthélémy Schwartz, publiée dans l’Eprouvette n°2 (2006), autour de l’aventure de Dorénavant : une revue avant-gardiste en bande dessinée (1986-1989)

Jean-Christophe Menu – Qu’as-tu pensé en découvrant le n°1 de L’Eprouvette où était citée et développée l’aventure Dorénavant pour la première fois depuis des années?eprouvette2

Barthélémy Schwartz – De l’étonnement d’abord. Qu’on parle de Dorénavant en bande dessinée, c’est plutôt nouveau, j’étais plutôt habitué à ce que l’expérience soit occultée. Cela a été aussi un retour un peu brutal sur une aventure ancienne, tu sais que j’ai pris mes distances avec la bande dessinée plus ou moins après Labo, [1990] j’ai cessé de suivre, après, ce qui se faisait en bande dessinée, même si j’ai continué à m’intéresser au langage de la bande dessinée, à travers le collage par exemple. Je voulais passer à autre chose. Aussi y revenir d’un coup, aujourd’hui, cela me fait une impression un peu étrange. En même temps, il y a quelque chose d’intéressant, avec Dorénavant j’ai toujours eu l’impression d’être dans une sorte de «décalage temporel» en bande dessinée, cela m’intéresse, puisqu’on revient sur Dorénavant, de confronter ce qui a été fait avec aujourd’hui, en quoi c’est actuel ou au contraire dépassé. D’où mes grandes interrogations quand tu m’as envoyé le n°1 de L’Eprouvette, tout cela est remonté d’un seul coup !

Qu’est-ce qui t’a amené à revenir sur Dorénavant ? Et surtout, pourquoi après avoir privilégié l’aspect création dans L’Association, ce besoin pour toi aujourd’hui, avec L’Eprouvette, d’un retour à la réflexion et à la critique en bande dessinée?

JCM – Je pense que c’est un mélange de choses qui a fait apparaître ce retour de la critique dans mes préoccupations: des raisons personnelles (le tournant de la quarantaine, une remise en perspective de mon parcours, le fait que je doive terminer un Doctorat d’Arts Plastiques commencé il y a plus de quinze ans, un déménagement qui me permet d’avoir de nouveau accès à certaines archives … ); et des raisons extérieures, essentiellement le point d’orgue où en est arrivé le système de récupération-vulgarisation de ce que L’Association a contribué à faire exister depuis 1990. De toute évidence, depuis 2003-2004, on assiste au bouclage d’un cycle : la machine de la grosse édition-diffusion a intégré et digéré notre «alternative», et en arrive (en ayant incorporé tout ce qu’on lui opposait!) au même point de surproduction et de confusion que ce que nous avions connu à nos débuts à la fin des années 80. L’indigence et la médiocrité du microcosme BD n’ont pas disparu entre 1990 et 2003 (loin de là) mais on pouvait s’en tenir à l’écart. Le mouvement globalisant pour tout réincorporer dans une «BD» comme entité abstraite et pseudo-œcuménique nous remet malgré nous en position de réaction et d’opposition. Ajouté à cela quelques détails qui ne sont pas passés, et voilà le paysage dans lequel on rouvre l’armoire aux vieux fusils rouillés … Voilà comment j’ai d’abord écrit Plates-bandes, puis comment face à une prise de conscience assez large et encourageante, s’est créée L’Éprouvette. D’emblée, L’Éprouvette s’est retrouvée liée aux prises de position polémiques pré-Association de la fin des années 80 (Lynx, Globol, Labo), qui dans mon esprit et mon souvenir devaient beaucoup aux expériences Controverse et Dorénavant. Par ailleurs, il y avait STP, que je crois tu ne connaissais pas mais qui dix ans plus tôt élaborait des réflexions similaires. J’ai trouvé intéressant de tenter un panorama de ce qui avait alors parfois été appelé «ultracritique» (par Thierry Groensteen, notamment).

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Ces poètes seront


Ce texte a été publié en 1987 dans Dorénavant n°6 ; puis repris dans le dossier consacré à la revue dans l’Eprouvette n°2 (Association, 2006).

Nous ne parlons pas pour les contemporains mais pour les générations à venir, plus riches en enseignement que nous, gestalt theorieplus sévères, plus conséquentes. Durant toutes ces années, nous aurons eu le mérite d’exister, cela n’aura pas été une mince victoire. Notre principal mérite aura moins été de nous faire entendre à tout prix que de nous faire comprendre, nous ne pouvions qu’être sévères envers les entreprises de falsification quelles que soient leurs formes particulières. Notre style aura été définitif par nécessité. Terroristes, nous aurons été, malgré tout, de bien courtois « terroristes » dans le territoire des mickey-cancans, comparés à d’autres autrement plus redoutables dans des territoires autrement plus engageants. Qu’on se rassure, les générations futures n’auront plus besoin des ambages qui nous auront été nécessaires et seront bien plus admirables que nous l’aurons été durant ces courtes années.

Notre démarche aura été essentiellement historique. Ô mon amie, crains qu’un jour un train ne t’émeuve plus. Nous n’aimons pas assez la joie de voir les choses neuves. Nous aurons eu tout à prouver, notre innocence et notre stratégie, nous ne pouvions qu’aller très vite ou ne pas exister. Nous étions pressés par le temps. La bande dessinée nous intéressait comme langage, et le langage a toujours été la seule chose qu’il y ait eue vraiment de passionnante au monde.

Les mots ont souvent l’âge de ceux qui les choisissent.
Edmond Jabès, je te salue

Dans ma rue, je crois tenir les mots en laisse, ce n’est jamais un chien que je promène. T’es-tu demandée ce que tu ferais, au matin, si ouvrant ta fenêtre, tu n’apercevais autour de toi que la mer? Ta pensée t’abuse. Seul un noyé sait parler du fleuve.

À cette époque, la bande dessinée s’exprimait si mal qu’il était véritablement nécessaire de réapprendre à parler. Ce fut notre premier travail. Nous ne voulions pas parler le langage des autres afin de ne pas exprimer leurs idées. On comprend dès lors que nous ayons eu très peu d’ouvrages à lire. Notre sentiment était d’écrire Alcools à une table de parnassiens.

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73 notes sur la bande dessinée


Ces notes ont été (re)publiées dans L’Eprouvette n°2 (L’Association, 2006), et préalablement dans la revue avant-gardiste Dorénavant en 1986 et dans Labo n°1 (Futuropolis, 1990) – cf. fin de cet article.eprouvette2
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« Ton public n’est ni le public des livres, ni celui des spectacles, ni celui des expositions, ni celui des concerts, tu n’as à satisfaire ni le goût littéraire, ni le théâtre, ni le pictural, ni le musical. » Robert Bresson, Notes sur le cinématographe)

Le texte d’une bulle n’est pas le son de la parole.

Une bande dessinée qui n’est que la bande dessinée d’un film à réaliser n’est qu’un story-board.

Un auteur de bande dessinée qui fait des story-boards est un bédécinéaste.

Alors qu’on a appelé musique : le son-mélodique-articulé, littérature : la narration-écrite, et cinéma : les images-en-mouvement-simultané, la bande dessinée n’a pas de nom.

La bande dessinée, c’est une image globale formée d’images locales.

Un story-board, parce qu’il n’est qu’une série d’images cinématographiques figées, n’est pas encore de la bande dessinée, mais du cinéma non articulé.

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