(Publié dans Oiseau-tempête n°10, 2003)
Daniel Lindenberg analyse dans son livre, Le Rappel à l’ordre, enquête sur les nouveaux réactionnaires (1) une tendance visible en France, presque banalisée depuis quelques années, d’une remise en cause des valeurs démocratiques. Par « démocratie », il entend la société actuelle ; précisons, ici, qu’il s’agit du régime démocratique du capitalisme d’économie mixte aujourd’hui en crise. « Le 21 avril 2002 (2), écrit-il, a emporté bien des certitudes. N’y voir qu’un effet du discrédit des élites, comme le font beaucoup ces derniers temps, c’est non seulement faire le jeu des populismes qui ont aujourd’hui le vent en poupe en Europe, mais aussi ignorer la puissance corrosive des idées qui s’affirment et que traduit le retour de thèmes aux saveurs un peu oubliées : l’ordre, l’autorité, la restauration des valeurs, le ‘‘peuple réel” (souvenons-nous un instant du “pays réel” de Charles Maurras), voire le culte des racines et des identités constituées. Autant de figures qui renvoient en réalité à une méfiance de plus en plus marquée à l’égard de la démocratie, de l’État de droit et des fondements d’une “société ouverte” au moment même où on les croyait durablement installés dans les esprits. […] Exit l’État de droit, retour à l’État-Léviathan comme ultime recours devant le spectre de la “guerre de tous contre tous”. Tel serait le programme du “siècle qui naît”. »
Dans ce contexte récent, certains découvrent la nation « fondatrice de la civilisation », d’autres, tel ce sociologue qui revendique « soyons réactionnaires ! » et rappelle « l’essence de la chrétienté, porteuse de nos valeurs et de notre esprit de tolérance (3) » ; d’autres encore envisageraient de revoir les termes de la séparation de l’Église et de l’État dans le sens d’une revalorisation positive de la « chrétienté ». Cette recomposition idéologique touche, par exemple en France, à la fois les milieux de droite et de gauche (politiciens, intellectuels et chefs d’entreprise). Le vote « unanime » des députés socialistes et l’« abstention » des communistes (d’accord sur la « nécessité de sanctionner » même s’ils trouvent la peine « excessive (4) ») en faveur des textes sécuritaires votés en 2003 réprimant l’outrage au drapeau patriotique ou à La Marseillaise ( 5) n’ont fait que confirmer cette tendance.
Pour Lindenberg, le regain d’intérêt, aujourd’hui, pour le théoricien et juriste nazi Carl Schmitt (6) est un symptôme, parmi d’autres, de cette évolution qui aurait, selon l’auteur, davantage à voir avec l’atmosphère intellectuelle préfasciste de l’entre-deux-guerres qu’avec l’idéologie des Lumières. Les écrits de Schmitt rencontrent, en France, un engouement depuis quelques années, alors qu’auparavant ils étaient lus principalement par les milieux d’extrême droite. On relit ses œuvres comme d’autres (pour Lindenberg ce sont les mêmes) redécouvrent Charles Maurras, Charles Peguy ou Léon Bloy.
Au-delà du constat qu’il dresse de son époque, les limites de l’essai de Lindenberg sont celles de la pensée moderniste qu’il défend : « L’acceptation du système des partis, l’attachement à l’État de droit, le souci de l’individu et de ses droits et l’acquiescement à l’économie de marché ainsi qu’au pluralisme de l’information » …et la mondialisation. Mais comme le dit son collègue Jean-Claude Monod : « Passer de l’horizon de l’État social à celui de la république autoritaire constitue bien une régression (7). » Ce que ces défenseurs du modernisme républicain ne voient pas, en revanche, c’est que les critiques actuelles portées contre les valeurs du régime démocratique, loin d’appeler à un régressif retour en arrière cherchent, au contraire, dans le dépassement de la démocratie d’économie mixte et le rejet de l’idéologie des Lumières, une solution capitaliste autoritaire et qui se veut moderne à la crise. C’est cela qu’exprime, parmi d’autres symptômes, le retour, « très tendance » à Carl Schmitt, qui ne faisait pas mystère à son époque de son mépris pour la démocratie, cherchant dans l’État totalitaire le dépassement de la démocratie libérale en crise, dans le culte du chef le dépassement des faiblesses du régime parlementaire coupé du « peuple » ou dans la dualité ami/ennemi le dépassement des luttes sociales, c’est-à-dire la recomposition sociale autour de la figure fétiche du chef.
La recomposition idéologique à laquelle nous assistons suit une tendance affirmée en faveur d’un État plus autoritaire (à laquelle, d’ailleurs, les socialistes en France, et en Europe, ne sont pas étrangers), qui apparaît à la fois comme une constante depuis une douzaine d’années (les lois d’exception « Vigipirate » sont appliquées sans discontinuer depuis 1995 et régulièrement « renforcées ») et un effet de l’accélération de l’Histoire provoquée par les attentats du 11-Septembre (les lois sécuritaires votées depuis cette date, la criminalisation de la contestation, etc. (8)). La facilité avec laquelle les nouveaux idéologues dynamitent les positions idéologiques de leurs adversaires démocrates montre combien cette tendance vers un État plus autoritaire habillé dans le sécuritaire, initié et légitimé par les forces démocrates, est non seulement constante mais ascendante.
L’équité, ce n’est pas l’égalité
Le glissement d’une conception libérale de la démocratie (héritée des Lumières) vers une conception plus autoritaire est perceptible dans les transformations de la langue ( 9), depuis quelques années, par exemple dans le passage insidieux de la notion d’« égalité » à celle d’« équité ». De l’équité, on peut lire dans l’Encyclopædia Universalis qu’elle « complète » le droit : quand on manque de lois, on consulte l’usage ou l’équité. L’équité renverrait à une sorte de « justice naturelle » (dans le droit anglais, on parle de natural justice pour évoquer l’équité), qui serait supérieure aux lois. On parle également de sentiment d’équité qui permettrait au juge de corriger le droit. L’Encyclopædia Universalis indique également que si l’équité est un « appel aux sentiments les plus nobles de l’homme, il faut pourtant […] être prudent avant de lui reconnaître préséance sur la règle de droit. Y avoir recours sans raison grave reviendrait à détruire le droit lui-même. Ce serait abandonner les citoyens à l’arbitraire du pouvoir ou de juges plus ou moins indépendants, plus ou moins bien inspirés. Il faut comprendre la plainte du peuple français sous l’Ancien Régime : “Dieu nous garde de l’équité des parlements !”.» Sans accorder plus d’importance qu’il n’en faut aux dictionnaires et aux encyclopédies, qui sont à l’ordre des mots et du langage ce que le droit est à la vie sociale (l’histoire d’un mot est aussi une histoire sociale), retenons cependant que si l’équité « complète » le droit, elle peut aussi, à l’occasion, en flattant le sentiment d’injustice de l’« opinion publique », servir à s’en passer (ou à s’asseoir dessus). En d’autres termes, le droit exprimant dans une forme juridique l’état des rapports sociaux, l’appel au sentiment d’équité peut aider à préparer l’opinion sur la nécessité de modifier le droit pour le rendre plus conforme à des rapports sociaux qui sont en train d’être changés dans les faits, justement dans un sens opposé.
L’équité est depuis plusieurs années remise au goût du jour pour remplacer la désuète (nous dit-on) notion d’égalité. Avec l’époque de gestion frontale des rapports sociaux que l’on connaît aujourd’hui, cette dernière a perdu la pertinence idéologique qu’elle avait quand elle se déclinait dans le consensus social disparu avec les lointaines années 1980. Dans « équité », en effet, il y a la double idée d’absence d’égalité et de répartition « plus juste » des richesses, qui loin d’être antagonistes se complètent l’une et l’autre. La « juste répartition » peut trouver sa place démagogique à tous les échelons d’une pyramide sociale qui peut rester immuable dans son principe hiérarchique ou se modifier dans un sens de plus en plus inégalitaire. La notion d’équité accompagne ainsi, en France, le mouvement de transfert des richesses auquel on assiste depuis une vingtaine d’années dans le monde occidental, des classes les plus démunies vers les élites, pour pallier la rareté d’une plus-value que les capitalistes peinent de plus en plus à extraire des infatigables « ressources humaines ». Ainsi, par exemple, en France, « en 1975, les 10 % de Français les mieux payés l’étaient 9 fois plus que les 10 % les plus pauvres. En 2002, ils le sont 20 fois [plus] (10). »
Derrière l’équité, il y a la consolidation idéologique des différences sociales qu’il s’agit désormais d’affirmer sans complexe. Le droit d’ingérence équitable permet ainsi d’intervenir directement dans les rapports sociaux, tout en donnant l’impression de ne pas y toucher. L’opération de racket institutionnalisé sur les retraites des salariés du public menée en 2003 en est un exemple révélateur qui s’est décliné en trois mouvements. D’abord, l’affirmation péremptoire (où la décision politique se cache dans la nécessité) : les retraites doivent baisser ; ensuite, le fait social sur lequel la démonstration s’appuie : les retraites ont déjà baissé pour le secteur privé en 1993 (sous les coups de la politique du cossu Premier ministre d’alors) ; enfin, l’appel au sentiment de justice de l’opinion publique : par souci d’équité, il faut homogénéiser (mais par le bas !) le niveau global des retraites des salariés du privé et du public ( 11). Bref, l’équité, c’est l’égalité pour tous dans la précarité généralisée, sauf pour les élites. C’est ce que disait déjà, à sa façon, au XVIIIe siècle, Georg Christoph Lichtenberg : « N’y a-t-il pas de différence entre l’équité et la tyrannie ? ( 12) »
La propagande qui ne se voit plus
Une même interprétation moderniste dans la dénonciation des symptômes que précédement est présente chez Philippe Breton avec son livre, La Parole manipulée (13). Un petit livre, concis et efficace, que l’auteur consacre aux techniques de manipulation de masse développées depuis la Seconde Guerre mondiale et aux dangers qu’elles représentent aujourd’hui pour la démocratie. Ici aussi la « démocratie » n’est pas définie autrement que chez Daniel Lindenberg : « La manipulation menace la démocratie, écrit l’auteur. Sa simple existence en sape les fondements en privant ce régime politique de ce qui constitue son élément le plus essentiel, la liberté de parole. » (Certes, mais comme élément « le plus essentiel » du capitalisme démocratique d’économie mixte, on pense plutôt à la généralisation de la fausse représentation politique et au spectacle comme moyen idéologique d’encadrement de masse, masquant partout l’exploitation des salariés par la contrainte.) Dans ce dispositif social, écrit-il, la « liberté de parole » est remplacée par la fausse parole avec laquelle elle est confondue. C’est ce qu’écrivait crûment le sociologue américain Harold D. Lasswell en son temps, un des tout premiers spécialistes de la communication : « Propagande rime désormais avec démocratie. La propagande constitue le seul moyen de susciter l’adhésion des masses ; en outre, elle est plus économique que la violence, la corruption ou d’autres techniques de gouvernement de ce genre ( 14). »
Après avoir montré leur efficacité dans l’entre-deux-guerres, les techniques de manipulation de masse ont connu un nouvel essor dans les années 1950 avec la rencontre des publicitaires et des spécialistes des sciences du comportement. Partant de l’échec des approches traditionnelles fondées sur le supposé « comportement rationnel » du consommateur (15), la publicité va se transformer en « vaste région de l’empire du convaincre » et accorder de plus en plus d’importance aux instincts et à la manipulation des comportements. Philippe Breton explique d’une part ce changement qualitatif par la nécessité d’écouler à tout prix des marchandises produites en surnombre à cette époque (les fameuses « trente glorieuses », années 1950-1970) : « C’est du constat de l’impossibilité de la publicité “traditionnelle” à réaliser cet objectif, écrit-il, qu’est né et que s’est développé tout un secteur manipulatoire au sein de la publicité. »
D’autre part, précise-t-il, alors qu’on associe ordinairement la manipulation à « l’ère des foules », il faut la mettre en relation, au xxe siècle, avec la scolarisation, l’éducation, l’alphabétisation. En effet : « C’est bien, écrit-il, parce que le public, d’une certaine façon, est trop éduqué pour les mensonges qu’on lui propose qu’il faut utiliser des méthodes dont la caractéristique va être de contourner cette éducation, de faire régresser l’individu vers un état où il sera maléable à l’influence », car, ajoute-t-il : « l’emploi de la propagande et des méthodes manipulatoires suppose toujours une résistance de l’opinion. Sans cette résistance, un tel effort est inutile et relève du gaspillage » ; ou, comme le souligne, pour sa part, Vance Packard : « l’idée de faire appel au subconscient », c’est-à-dire d’utiliser de nouvelles techniques de persuasion, « est venue en grande partie des difficultés sans cesse rencontrées par les industriels à faire acheter par les Américains ce que leurs usines étaient capables de produire (16). »
L’essor de la manipulation de masse, à partir des années 1950, a été accompagné, dans le secteur universitaire (dit académique), par une critique de ces nouvelles techniques que les industriels mettaient en œuvre dans les domaines de la consommation, des loisirs et du travail (la publicité, la propagande d’entreprise). La critique académique s’est consolidée à cette période autour des travaux de Vance Packard, comme La Persuasion clandestine publiée en 1958, ou dans le prolongement de ceux effectués dans l’entre-deux-guerres par Serge Tchakhotine, dont Le Viol des foules par la propagande politique est réédité dès 1952 (17). Trente ans plus tard, avec le retour durable de la crise économique, ce champ disciplinaire va peu à peu disparaître des enjeux académiques à un moment où, paradoxalement, les méthodes de persuasion de masse vont redevenir d’actualité et se développer considérablement : « De la même façon, écrit Philippe Breton, que la propagande semblerait désormais appartenir au passé, les procédés qu’évoquaient les critiques de la publicité auraient perdu de l’intensité aujourd’hui. Un consensus semble s’établir autour de propositions comme celles du sociologue français Gilles Lipovetsky, qui déclare par exemple que la publicité est “tout sauf un pouvoir de direction et de formation des consciences” […]. Le même phénomène survient pour ce qui concerne la manipulation en politique. […] La cause est entendue : la propagande, terme désormais péjoratif, est devenue une catégorie pour historien [assimilée aux seuls régimes totalitaires]. »
Philippe Breton estime, en effet, que la manipulation de l’opinion n’a fait qu’empirer depuis cette période. Il rappelle opportunément pour ceux qui ne voient d’ordinaire la manipulation que dans la publicité, les médias ou la propagande politique, c’est-à-dire dans la sphère citoyenne, qu’elle est aussi présente, sinon plus, dans le monde du travail. Presque toutes les entreprises de plus de 5 000 salariés en France, en effet, disposent aujourd’hui d’un « service de communication », la moitié d’entre elles depuis 1985. Autrement dit, depuis le retour de la crise comme phénomène de longue durée, la critique universitaire des méthodes de manipulation de masse a perdu de son utilité idéologique : désormais, celles-ci ne doivent plus être critiquées, pour être effectives elles se doivent d’être insidieuses, c’est-à-dire ne plus apparaître comme telles.
La manipulation de l’opinion et l’occultation parallèle de la critique des techniques manipulatoires sont le pendant idéologique du sécuritaire qui leur est contemporain : la gestion plus frontale des rapports sociaux a besoin à la fois du répressif pour contraindre les résistances effectives et de la manipulation de l’opinion pour briser celles des consciences. C’est ainsi que la notion d’équité remplace désormais celle d’égalité, ce simple changement dans la langue exprime celui de tout un contexte social. Comme le faisait remarquer Karl Korsch : « Les rapports matériels de production ne peuvent se constituer qu’en relation avec les formes de conscience sociale sous lesquelles ils apparaissent et sans lesquelles ils ne peuvent subsister (18). »
Barthélémy Schwartz
NOTES :
1 – Daniel Lindenberg, Le Rappel à l’ordre, enquête sur les nouveaux-réactionnaires, Seuil 2002.
2 – En 2002, l’extrême droite est parvenue au deuxième tour de l’élection présidentielle en France, passant devant le candidat de gauche éliminé, de ce fait, dès le premier tour.
3 – « Soyons réactionnaires », Catherine Pauchet, sociologue, Libération, 29 novembre 2002 ; du même tonneau : « Pour la République démocratique », Blandine Kriegel, Libération, 4 décembre 2002.
4 – « La gauche se rallie à l’étendard de Sarkozy – elle a voté le texte sur les outrages au drapeau et à l’hymne [national] », Libération, 25 janvier 2003.
5 – Six mois de prison et 1500 euros.
6 – Juriste allemand, très marqué par les penseurs de la contre-révolution française, Carl Schmitt (1888-1985) adhère au Parti national-socialiste le 1er mai 1933. Il est nommé la même année par Goering au Conseil d’État de la Prusse où il siège aux côtés de Himmler et d’autres dignitaires nazis ; en octobre 1933, il est nommé professeur titulaire de la chaire de droit public de l’université de Berlin (il conservera ces deux fonctions jusqu’en 1945.) L’année suivante, on lui confie la direction de la Deutsche Juristen Zeitung, l’organe officiel du droit national-socialiste où il publiera de nombreux articles cautionnant les lois nazies. Schmitt ne reniera jamais sa participation au régime hitlérien.
[Ajout 2007 – Selon le Monde du 26 janvier 2007, certains verraient aujourd’hui en Carl Schmitt un penseur qui « aiderait la gauche radicale à penser l’actualité, que ce soit la dépolitisation de la société américaine ou bien le nouvel ordre international de l’après-11-Septembre. »]
7 – Libération, 4 décembre 2002.
8 – On se souvient du fameux e-mail qu’un membre du gouvernement britannique a envoyé à ses collègues peu après les attentats du 11-Septembre : « Moins d’une heure après que les deux avions se sont écrasés sur le World Trade Center, le 11 septembre, Jo Moore, une conseillère du ministre britannique des Transports, a envoyé un e-mail à ses supérieurs : “Sujet : relation avec les médias. C’est un très bon jour pour ressortir tout ce qu’on veut faire passer en douce.” » Libération, 10 octobre 2001.
9 – [Ajout 2007 – Lire sur cette question, Eric Hazan, LQR, la propagande du quotidien, Raison d’agir, 2006.]
10 – Libération, 12 décembre 2002. [Ajout 2007 – Aux États-Unis : « Entre 1947 et 1973, les revenus (hors inflation) d’une famille moyenne avait doublé. Entre 1973 et 2003, ils n’ont augmenté que de 22 %, cette progression étant, avant tout, le fait d’un accroissement du travail féminin et des heures supplémentaires et non pas de la hausse des rémunérations. […] Dans le même temps, les inégalités se sont creusées : le 1 % d’Américains les plus riches a vu ses revenus doubler depuis 1973. » Le Monde, 15 décembre 2005. Ce que complète ce nouvel article, toujours dans Le Monde, deux ans plus tard : « Le nombre de personne ayant basculé dans l’extrême pauvreté aux États-Unis n’a jamais été aussi élevé depuis trente ans. […] “Le nombre d’Américains très pauvres a augmenté de 26 % de 2000 à 2005”, et cette hausse “excède de 56 % la croissance de l’ensemble de la population pauvre pendant la même période.” (afp). »] Voir aussi, dans le n° 10 de la revue Oiseau-tempête, Charles Reeve, « Les forteresses fragiles », et Sabina, « Économie de crise et patriotisme économique ».
11 – [Ajout 2007 – Dans d’autres contextes, l’équité peut révéler son vrai visage, ainsi, en 2006, à propos des « anciens combattants de colonies », un ministre délégué expliquait que : « Jacques Chirac, mû par des préoccupations humanistes, est décidé à aller plus loin. Il veut tendre à une égalité, et non plus seulement à l’équité, entre nos compatriotes et leurs camarades d’armes étrangers. Il y a une injustice manifeste, il faut la supprimer. » (Le Monde, 26 septembre 2006). Avant, quand les seconds touchaient une pension de 30 % inférieure à celle des premiers, c’était l’équité ; c’est-à-dire « l’injustice » que regrette le président de la République…]
12 – Georg Christoph Lichtenberg, Cahiers d’aphorismes 1764-1799, traduction de Marthe Robert, Denoël, 1980.
13 – Philippe Breton, La Parole manipulée, La Découverte, 2000.
14 – Cité par Philippe Breton, idem.
15 – Citant Vance Packard, P. Breton rappelle ce cas exemplaire : « Une des erreurs les plus onéreuses fut commise par la société Chrysler, qui supposa que les gens achètent des automobiles d’une façon rationnelle [et] pensa qu’il fallait au public une voiture en harmonie avec l’époque, sans fioritures, solide et facile à garer… [Le marché s’effondra, Chrysler changea de stratégie et obtint] un des revirements commerciaux les plus spectaculaires de l’histoire. »
16 – Cité par Philippe Breton, idem.
17 – Serge Tchakhotine, Le Viol des foules par la propagande politique, 1939 ; 1952. Ce dernier critiquait, dans les années 1930, l’utilisation « négative » des nouvelles techniques de conditionnement des comportements par la propagande nazie, mais pour défendre une utilisation « positive » de ces mêmes techniques dans la lutte des démocrates contre Hitler (voir son rôle dans le Front populaire. Sur ce personnage, lire Front populaire et révolution manquée de Daniel Guerin, Acte Sud/Babel. Réédition chez Agone, 2012.
18 – Karl Korsch, Marxisme et Philosophie, 1923, éditions de Minuit, 1964.
(Publié dans Oiseau-tempête, n°10, 2003,
repris dans De Godzilla aux classes dangereuses, Alfredo Fernandes, Claude Guillon, Charle Reeve, Barthélémy Schwartz, recueil d’articles parus dans la revue Oiseau-tempête, éditions Ab irato, 2007, 93 p., 8 euros.)